News Letter n°2023 - 50 du Samedi 16 Décembre

Double Matérialité : Comment faire ?

CSRD = Corporate Sustainability Reporting Directive

= Directive sur les rapports de durabilité des entreprises


J'ai déjà abordé deux fois cette année la question de la Double Matérialité :

On aura compris que la Matrice de Matérialité est le socle du Rapport Durable

Mais comment fait-on et pour quels enjeux ?

NB : vous l’aurez compris, si vous êtes déjà un spécialiste de la RSE ou une grande entreprise, cet article n’est pas pour vous. Cet article est destiné aux ME (microentrepreneur effectif de moins de 10 personnes) et aux TPE/PME (effectif de moins de 250 personnes), non concernées (pour l’instant) a priori par la CSRD, sauf si donneurs d’ordres et autres parties prenantes les interrogent sur leurs propres indicateurs. Mais, cela peut servir de source d’inspiration, je l'espère ! Je vous laisse juge.


Voyons :

  • L'exigence prévue dans la Norme ESRS 1 : c'est quoi la double matérialité
  • Analyse des points d'exigence et gestion de projet
  • L'outil approprié
  • La méthodologie proposée par l'EFRAG
  • Résumons la méthode

L'exigence prévue dans la Norme ESRS 1 : c'est quoi la double matérialité

Bien que j'en ai longuement parlé dans l'article mentionné ci-dessus, je vous propose un petit rappel du §3 de la norme ESRS 1 qui annonce en titre de ce paragraphe 3 que "La double importance / matérialité est le fondement de la publication d’informations en matière de durabilité" et en défini les principes basés sur :

  • Les parties prenantes et leur rôle dans l’évaluation de la matérialité
  • La notion de matérialité (d'importance, de significativité)
  • Les 2 dimensions de la matérialité : la matérialité en termes d'impacts (importés ou exportés), la matérialité en termes financiers (risques et opportunités)
  • Les seuils de significativité qui peuvent se traduire en terme d'impact ou en terme financier ou les deux
  • L'importance d'une information en terme d'Impacts (sous entendu ESG) peut être positive ou négative, réelle ou potentielle, à court, moyen ou long terme. Sont concernées les activités propres de l’entreprise et sa chaîne de valeur en amont et en aval. L'importance négative réelle se mesure en terme de gravité des impacts, l'importance négative potentielle se mesure en terme de gravité et de probabilité des impacts et repose bien sûr sur la diligence raisonnable (= le devoir de vigilance).
  • L'importance d'une information en termes financiers est liée au fait que son omission, son inexactitude ou son obscurcissement, influence les décisions que prennent les utilisateurs (financiers ou autres) à la lecture du rapport durable de l’entreprise, que cela porte sur le développement, la position financière, les résultats financiers et les flux de trésorerie d’une entreprise ou sur son accès au financement ou le coût du capital à court, moyen et long terme. L'évaluation de l'importance d'une information financière tient compte de sa probabilité d’occurrence et de son ampleur potentielle.
  • La prise en comptes d'impacts négatifs qui engendrent des risques financiers ou des remédiations aux risques financiers qui engendrent des impacts négatifs. L'entreprise signalera alors ces situations au moyen de références croisées (exemple de l'abandon d'un activité trop carbonnée qui entraine des pertes d'emplois).
  • la "désagrégation" des informations par pays ou par site si cela permet une meilleure compréhension des données, ou aussi par secteur (lorsque les normes sectorielles auront été publiées).

Analyse des points d'exigence et gestion de projet

L'entreprise a donc pour obligation légale de préparer et publier ses IMD (Informations en Matière de Durabilité), alias un Rapport Durable. Comme vous le savez, l'EFRAG a publié en un tableau de synthèse les 1178 points de données (Datapoints), exigences de publication, attendus. 1178 points ? évidement, il s'agit chiffre avant analyse de double matérialité. (analyse des doubles seuils de signification).

Analyse qui doit être menée en respectant le devoir de vigilance (simplifions les droits de l'homme) et en prenant en compte toutes les parties prenantes.

Compter pour mener cela à bien 6 à 9 mois, selon la complexité de l'entreprise.

Est-ce qu'une telle étude ne demande pas un vrai savoir faire en matière de gestion de projet ?


Comme vous le savez, le management de projet consiste à organiser le déroulement d'un projet de A à Z, de sa phase de conception à sa phase finale. L'objectif sera décidé et les moyens alloués.

Dans notre cas, l'objectif est clairement défini et les règles précises :

Il s'agit délaborer le Rapport Durable, les IMD (les Informations en Matière de Durabilité) complètement encadré par la Directive CSRD et ses Normes auquelles s'ajoute le règlement Taxonomie, avec quelques accointements vers le règlement SFDR (obligations réglementaires sur les infoemations relatives à la finance durable).


Il existe de multiples méthodologies pour piloter un projet :

  • La méthode traditionnelle
  • Chaque étape est suivie dans l’ordre chronologique. On ne passe pas à l’étape suivante du projet sans que la précédente soit terminée. Tout est planifié à l’avance, le planning et les rôles de chacun sont minutieusement définis. Pas de place pour l’imprévu. Ce type de méthode ne peut pas prendre en compte l’évolution des besoins d’un client ou d’un contexte et ne tolère aucun imprévu.
  • La méthode PERT
  • La méthode PERT consiste à lister les tâches nécessaires à la réussite d’un projet et à les lier entre elles (chronologie et dépendance des tâches entre elles). On utilise souvent le mind mapping (cartes heuristiques) pour cela. Une date de début et une date de fin sont attribuées à chaque tâche de sorte à pouvoir déterminer la date de fin du projet avec précision.
  • Le lean management
  • Tout gaspillage doit être éliminé pour atteindre la meilleure performance possible et satisfaire le client. Cela implique de rendre un travail de haute qualité en limitant les délais, les coûts et les ressources. Cette méthode permet d’atteindre de bons résultats avec des délais serrés, une petite équipe ou un maigre budget.
  • La méthode Agile
  • Les besoins du client sont placés au cœur des projets. Cette méthode flexible consiste à découper un projet en plusieurs petits projets, de sorte que le client puisse valider chaque étape au fur et à mesure. La méthode Agile est un parfait moyen de s’assurer la satisfaction de ses clients et un minimum de retours à la fin du projet.
  • La méthode Scrum
  • Le client participe activement au projet. L’équipe se réunit chaque jour lors d’une réunion de synchronisation pour suivre l’avancement du projet. Cette méthode repose sur plusieurs éléments fondamentaux, à savoir les rôles, artefacts, événements et règles définis.
  • Le mix des 5 méthodes
  • Dans notre cas particulier de l'élaboration de la carte de double matérialité, un mix judicieux des 5 méthodes sera appréciable (mais cela est valable aussi pour les autres aspects de l'élaboration du rapport durable, à commencer par le Bilan Carbone)


Quelque soit la méthode choisie, une gestion de projet ne s'improvise pas. Les grandes étapes restent :

  • La nomination d'un pilote, d'un chef de projet
  • La conception et la cartographie des enjeux
  • La planification (pour notre sujet du jour : la matrice de matérialité mais cela s'applique à tout l'IMD)
  • L'articulation de l'analyse avec l'existant
  • L'exécution
  • Le contrôle
  • La clôture (qui aboutit à la publication du Rapport Durable y compris l'avis de l'auditeur)
  • Le Bilan du projet : on prépare le Rapport Durable N+1


Le pilote du projet aura l'agilité nécessaire et la connaissance approfondie des exigences de la CSRD : choisissez le bien.


L'outil approprié

Pour gérer la masse de données et élaborer sans trop de difficultés, un tableur type Excel est peut être un peu léger. En plus de la question de la fiabilisation des données, s'ajoute plusieurs autres qualités ou fonctionnalités de base essentielles :

  • la capacité de gérer les liens avec les parties prenantes à la manière d'un logiciel de CRM (contacts, gestion des questionnaires, relances, procès verbaux des réunions (trace des dialogues entretenus), décisions, résultats obtenus)
  • l'archivage des données et leur sauvegarde (accès pour l'auditeur, évolution et comparabilité des informations au fil des années)
  • le transfert des données vers le système de publication européen ESAP

A cela s'ajoute les fonctionnalités évidentes et classiques de tels outils : multi accès, multi monnaies, classification des données, garantie de confidentailité, etc ...


La méthodologie proposée par l'EFRAG

L'EFRAG qui conçoit et publie les normes, a présenté un guide pour l'élaboration de la matrice de double matérialité, encore sous forme de projet.

Ce guide reprend :

  • les concepts clés
  • les lignes directrices
  • Notion d'importance,
  • Identification des sujets de durabilité
  • Chaîne de valeur
  • Les processus d'analyse de l'Importance financière
  • Les processus d'analyse de l'Importance relative aux impacts
  • La relation entre la dimension financière et la dimension d'impacts


Je reviendrai en détail sur ce guide dès sa parution en version "définitive" dans quelques semaines.

Résumons la méthode

  • 1 - Nommer un pilote du projet
  • 2 - Cartographier l'entreprise
  • 3 - Sensibiliser - Former les équipes
  • 4 - Cartographier la chaîne de valeur amont et la chaîne de valeur aval
  • 5 - Repérer et lister les informations disponibles
  • 6 - Prendre en compte les questions du devoir de vigilance
  • 7 - Lister et hiérarchiser les parties prenantes
  • 8 - Préparer l'approche financière
  • 1 - Préciser la définition du sujet de durabilité évalué.
  • 2 - Évaluer les éléments déclencheurs des effets financiers
  • 2 bis - En déduire les effets financiers importants
  • 3 - Déterminer l’importance financière d’un sujet de durabilité
  • 1 - Impacts sur les flux de trésorerie
  • 2 - Risques ou opportunités affectant les actifs ou passifs comptabilisés
  • 3 - Publication des « capitaux » actuellement utilisés qui contribuent à la création et au maintien de la valeur de l’entreprise (passé)
  • 4 - Publication des « capitaux » utilisés qui contribuent à la création et au maintien de la valeur de l’entreprise (développements futurs)
  • 9 - Préparer l'approche Impacts
  • 10 - Entamer les échanges avec les parties prenantes, puis le dialogue
  • 11 - Cartographier par thèmes ou sous thème
  • 12 - Présenter votre analyse de double matérialité



Au final vous devriez obtenir une jolie matrice qui ressemble un peu à ça

à suivre ...

Un beau casse-tête en perspective ...

mais pour de réelles avancées, et avec de la méthode (beaucoup de méthode) mais aussi du bon sens, cela devrait pouvoir se faire.

6 à 9 mois me parait tout de même court.



Cet article n'est qu'un premier "dégrossissage". Je reviens sur le même sujet très bientôt.


Si vous êtes une ETI et même si votre échéance n'intervient qu'au 1er janvier 2025,

vous avez tout intérêt à commencer ce 1er janvier 2024, c'est dans quelques jours.


N’hésitez pas à vous abonner et à liker bien sûr.

En parler ? https://www.rsepourtous.fr/rendez-vous

Transition écologique signifie avant tout Transformation des modes de vie.

à bientôt dans un prochain post : pour en savoir plus, continuer à se former, échanger les bonnes pratiques et changer nos habitudes.



Bonne semaine !

Environnementalement Vôtre

Véronique

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