News Letter n°2024 - 41 du samedi 12 Octobre

La stratégie nationale biodiversité

La prise en compte de la biodiversité et des écosystèmes est un point important de la CSRD à travers la Norme ESRS E4 : une question souvent mal connue (pour l'instant) dans les entreprises et qui demande un effort d'acculturation important : abordons cela à travers la Stratégie Nationale Biodiversité (SNB) 2030 de la France.

NB : vous l’aurez compris, si vous êtes déjà un spécialiste de la RSE ou une grande entreprise, cet article n’est pas pour vous. Cet article est destiné aux ME (microentrepreneur effectif de moins de 10 personnes) et aux TPE/PME (effectif de moins de 250 personnes), non concernées (pour l’instant) a priori par la CSRD, sauf si donneurs d’ordres et autres parties prenantes les interrogent sur leurs propres indicateurs. Mais, cela peut servir de source d’inspiration, je l'espère ! Je vous laisse juge.


Voyons :

  • Biodiversité : Qu'est ce que c'est ?
  • Quantité d
  • La Stratégie Nationale Biodiversité 2030
  • La Biodiversité dans la CSRD
  • Les sources

La biodiversité : qu'est ce que c'est ?

La biodiversité désigne l’ensemble des êtres vivants ainsi que les écosystèmes dans lesquels ils vivent. Ce terme comprend également les interactions des espèces entre elles et avec leurs milieux.


Sans biodiversité, pas de vie sur terre.

La biodiversité répond directement aux besoins primaires de l’Homme en apportant oxygène, nourriture, eau potable et produits de soins (médicaments). Elle contribue également au développement des activités humaines en fournissant matières premières et énergies.

La biodiversité procède de la vie sur la Planète TERRE :

  • contribution des animaux pollinisateurs
  • organismes participants au renouvellement des sols
  • préservation et restauration de sols inondables
  • filtration de l'eau, de l'air et des sols

Mais la biodiversité, et donc la vie sur terre, est très menacée : 18% des espèces ont disparu et 78% des habitats sont dans un état de conservation défavorable nous dit l'observatoire national de la biodiversité.

Une seule raison à cet état de faits, un seul responsable : le genre humain.


Une typologie des services rendus par la Biodiversité et les Ecosystèmes est présenté sur le site https://www.strategie.gouv.fr/. Je la reprends ci-dessous dans son intégralité :

On peut ajouter à cette liste les services de soutien :

que sont les processus naturels tels que le maintien des habitats, le cycle des nutriments, la production primaire ou le cycle de l’eau qui permettent l’existence des autres services

Les entreprises et la Biodiversité : pressions et dépendances

Les activités économiques dépendent de la biodiversité et de sa capacité à fournir les biens et services nécessaires à l’approvisionnement des entreprises, par là même au maintien et à la création d’emplois.

  • Les secteurs primaires (agriculture, pêche et autres produits de la mer, foresterie et traitement du bois en général)
  • Les secteurs secondaires et leur approvisionnement en matière première (textile, pharmacie, chimie, tous les développements en alternative au pétrole, agro-alimentaire)
  • Les secteurs des services comme le tourisme, le bien être

Et au delà de ces considérations terre à terre, il s'agit de préserver la santé et le bien vivre du vivant (Faune, Flore, Humains, Paysages)


La Banque de France estime que 42 % du montant des actions et obligations détenues par des institutions financières françaises est émis par des entreprises qui sont fortement ou très fortement dépendantes d’au moins un service écosystémique


La Banque Centrale Européenne (BCE) affirme que l’économie européenne est menacée par l’érosion de la Biodiversité : “Les entreprises, le secteur financier et les décideurs politiques ont longtemps sous-estimé, voir ignoré l’importance économique des services écosystémiques”.

Selon la BCE, 72% des entreprises de la zone euro, soit environ 3 millions d’entreprises, “dépendent de manière critique des services écosystémiques et seront confrontées à d’importants problèmes économiques en raison de la dégradation des écosystèmes”.

C'est à dire que des secteurs entiers de l’économie européenne ne pourraient fonctionner sans ces services.

Or, en Europe, selon l'IPBES,

  • "14 types d’habitats naturels sur 15 ont vu leur étendue et l’état de leur biodiversité décliner depuis les années 1950” et
  • 69% des surfaces naturelles de l’Union Européenne présentaient un statut de conservation défavorable.

Conséquences d'une telle situation :

  • accélération de l’inflation, par suite de l'augmentation des coûts de production des entreprises, notamment dans le secteur agricole.
  • impacts sur certains secteurs, qui dépendent des ressources naturelles renouvelables (bois ...),
  • impacts indirects liés à la qualité de l’air, de l’eau, ou à l’érosion des sols,
  • risque pour la stabilité financière de l’Europe : “environ 75% de tous les prêts aux entreprises de la zone euro sont accordés à des entreprises qui dépendent de manière critique d’au moins un service écosystémique.
  • 30% des investissements des assureurs dépendent de manière critique de la nature et des services écosystémiques qu’elle fournit.”


Et selon une étude du Boston Consulting Group, les opérations de quatre grandes chaînes de valeur :

  • l’alimentation,
  • l’énergie,
  • les infrastructures et le bâtiment
  • et la mode (le textile)
  • on ajoutera les matériaux et la chimie

sont actuellement à l’origine de plus de 90 % de la pression exercée par l’homme sur la biodiversité.

Les travaux d'études internationaux

La Convention sur la diversité biologique signée lors du sommet de la Terre de Rio de Janeiro (1992) reconnaît pour la première fois l’importance de la conservation de la biodiversité pour l’ensemble de l’humanité.


Le Rapport sur l’état mondial de la nature établit par les 130 experts mondiaux de l'IPBES (Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques - équivalent du GIEC mais pour la biodiversité) réunis à Paris en mai 2019 présente une évaluation capitale de l’état et des tendances du monde naturel, des implications sociales de ces tendances, de leurs causes directes et indirectes et, des actions qui peuvent encore être entreprises pour garantir à tous un avenir meilleur.


L'IPBES alerte sur le fait que "la nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l'histoire humaine" et que "le taux d'extinction des espèces s'accélère, provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier".


Le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montreal issu de la COP 15 Bioviversité de 2022, vise à stopper et inverser la perte de nature. Ce cadre comporte plusieurs cibles mondiales à atteindre à l’horizon 2030 et au-delà en vue de la protection et de l’utilisation durable de la biodiversité.

Le cadre se compose de quatre objectifs globaux à l’horizon 2050 axés sur :

  • la santé des écosystèmes et des espèces, notamment pour mettre fin à l’extinction d’origine anthropique d’espèces,
  • l’utilisation durable de la biodiversité,
  • le partage équitable d’avantages,
  • la mise en œuvre et le financement, notamment pour combler le déficit de financement de la biodiversité qui s’élève à 700 milliards de dollars US par an.

23 cibles ont été établies à l’horizon 2030 avec pour objectif :

  • la conservation de 30 % des zones terrestres, des eaux intérieures et des zones côtières et marines,
  • la restauration de 30 % des écosystèmes dégradés,
  • la réduction de moitié de l’introduction d’espèces envahissantes,
  • la réduction des subventions préjudiciables à hauteur de 500 milliards de dollars US par an.


Dans les normes ESRS,(dans lesquelles le cadre Kunming-Montréal est précisément référencé) les entreprises doivent prendre en compte ces cibles et objectifs et adapter leur stratégies et politiques en conséquences.

La stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030

La stratégie de l'Union Européenne vise à mettre la biodiversité sur la voie du rétablissement d’ici à 2030 dans l’intérêt des populations, de la nature et du climat.

Pour atteindre cet objectif, la stratégie vise à renforcer la résilience de nos sociétés (au sens "vie en commun") face aux menaces futures telles que :

  • les impacts du changement climatique
  • les incendies de forêt
  • l'insécurité alimentaire
  • les épidémies - notamment en protégeant les espèces sauvages et en luttant contre le commerce illégal d'espèces sauvages

La stratégie présente un schéma directeur aligné sur la position de l’Union européenne (UE) relative au cadre mondial en faveur de la biodiversité. Elle est au cœur du Pacte vert pour l'Europe.

  • Mise en place d'un réseau plus vaste de zones protégées à l'échelle de l'UE sur terre et en mer(élargissement des zones Natura 2000)
  • Lancement d’un plan de restauration de la nature de l’UE
  • Introduction de mesures pour permettre le changement transformateur nécessaire
  • Introduction de mesures pour relever le défi mondial de la biodiversité (exemplarité de l'Europe)
  • Mise en place d'outils en ligne de suivi des actions et des objectifs
  • Adoption de différents textes et règlements
  • Proposition de loi sur la restauration de la nature (06/022)
  • Lignes directrices sur les forêts (03/2023)
  • Proposition de loi sur la santé des sols (07/2023)
  • Proposition de règlement établissant un cadre pour la surveillance des forêts (11/2023)

La Stratégie nationale (française) biodiversité 2030

La Stratégie nationale biodiversité 2030 (SNB) concerne les années 2022 à 2030 et succède aux stratégies qui ont couvert les périodes 2004-2010 et 2011-2020.

La feuille de route établie a pour objectif de réduire les pressions sur la biodiversité, de protéger et restaurer les écosystèmes et de susciter des changements en profondeur au moyen de 40 mesures dans le respect du cadre Kunming-Montréal. 4 axes ont été retenus :

  • 1 - réduire les pressions qui s’exercent sur la biodiversité,
  • 2 - restaurer la biodiversité dégradée partout où c’est possible
  • et pour cela, les axes privilégiés sont de :
  • réduire de moitié le risque global lié aux pesticides ;
  • restaurer 30 % des écosystèmes terrestres et maritimes dégradés d’ici à 2030 ;
  • protéger 30 % du territoire national, terrestre et marin, dont 10% en protection forte ;
  • réduire de moitié l’établissement des espèces exotiques envahissantes ;
  • stopper l’extinction des espèces due aux activités anthropiques d’ici 2050.

Petite remarque personnelle : le WWF vient de publier son rapport annuel sur l’effondrement de la biodiversité, et rappelle que les populations d’espèces vivantes se sont effondrées de 73% depuis 50 ans : 2050, c'est bien loin, et le plan proposé sur ce point ne parait pas, à l'évidence, suffisamment ambitieux.

  • 3 - mobiliser tous les acteurs,
  • 4 - garantir les moyens d’atteindre ces ambitions.

La Stratégie nationale est ensuite déclinée dans les régions, ce qui permet d'ajuster celle-ci au plus près des particularités territorriales.

Vous pouvez retrouver ici les 40 mesures de la SNB : https://biodiversite.gouv.fr/les-mesures-de-la-snb dont voici la liste :

  • Mesure 1. Renforcer la stratégie aires protégées
  • Mesure 2. Lutter contre l’artificialisation des sols.
  • Mesure 3. Faire évoluer nos modes de gestion des espèces.
  • Mesure 4. Agir sur nos importations.
  • Mesure 5. Réduire l'impact du changement climatique.
  • Mesure 6. Réduire les pollutions diffuses d'origine agricole.
  • Mesure 7. Lutter contre la pollution plastique.
  • Mesure 8. Réduire les pollutions chimiques.
  • Mesure 9. Réduire les pollutions lumineuses et sonores.
  • Mesure 10. Limiter l'introduction et lutter contre les espèces exotiques envahissantes.
  • Mesure 11. Améliorer la lutte contre les pollutions.
  • Mesure 12. Accompagner le secteur agricole dans sa transition.
  • Mesure 13. Accompagner le secteur de la pêche.
  • Mesure 14. Accompagner le secteur de l'aquaculture.
  • Mesure 15. Renforcer la prise en compte des enjeux de protection de la biodiversité.
  • Mesure 16. Accompagner le secteur de la construction.
  • Mesure 17. Accompagner le secteur des infrastructures de transport.
  • Mesure 18. Accompagner les secteurs du tourisme, de la culture et du sport.
  • Mesure 19. Renforcer le cadre réglementaire européen.
  • Mesure 20. Renforcer les actions en faveur des trames écologiques.
  • Mesure 21. Ramener de la nature en ville.
  • Mesure 22. Renforcer la résilience des écosystèmes forestiers.
  • Mesure 23. Favoriser les haies.
  • Mesure 24. Maintenir et restaurer les prairies naturelles.
  • Mesure 25. Restaurer les zones humides.
  • Mesure 26. Protéger et restaurer nos sols.
  • Mesure 27. Renforcer la protection et inverser le déclin des espaces menacés.
  • Mesure 28. Assurer l'exemplarité de l'État et des services publics dans la préservation et la restauration de la biodiversité.
  • Mesure 29. Intégrer l'approche « Une seule santé » dans les politiques publiques et dans les territoires.
  • Mesure 30. Déployer la planification territoriale.
  • Mesure 31. Accompagner les entreprises pour renforcer leurs engagements.
  • Mesure 32. Pour éclairer les choix des consommateurs.
  • Mesure 33. Mobiliser tous les citoyens.
  • Mesure 34. Éduquer et jeunes générations.
  • Mesure 35. Promouvoir les métiers qui contribuent à la biodiversité.
  • Mesure 36. Développer et valoriser la connaissance sur la biodiversité.
  • Mesure 37. Mobiliser les financements publics en faveur de la biodiversité.
  • Mesure 38. Agir résolument pour la préservation et la restauration de la biodiversité à l'étranger.
  • Mesure 39. Mobiliser les financements privés en faveur de la biodiversité.
  • Mesure 40. Mettre en place une gouvernance de suivi de la stratégie nationale biodiversité pleinement interministérielle.

La biodiversité dans la CSRD

Il est répondu aux exigence de la CSRD par 12 Normes dont une est consacrée aux questions liées à la Biodiversité et aux écosystèmes (Norme ESRS E4).

Les sous- thèmes et sous-sous-thèmes du thème "Biodiversité" que l'entreprise doit aborder dans son rapport durable sont les suivants :


Vecteurs d’impact directs de la

perte de biodiversité

  • Changement climatique
  • Changement d’affectation des terres,
  • Changement d’utilisation de l’eau douce et des mers
  • Exploitation directe
  • Espèces exotiques envahissantes
  • Pollution
  • Autres

Impacts sur l’état des espèces

Exemples:

  • Taille des populations d’espèces
  • Risque d’extinction mondiale des espèces

Impacts sur l’étendue et l’état des

écosystèmes

Exemples:

  • Dégradation des sols
  • Désertification
  • Imperméabilisation des sols

Impacts et dépendances sur les

services écosystémiques



Il s'agit pour l'entreprise de publier les informations qui permettront aux lecteurs de son Rapport Durable de comprendre (§ 1 de la Norme ESRS 4) :

  • Les impacts positifs et négatifs importants (significatifs), réels ou potentiels (susceptibles de survenir), de l’entreprise sur la biodiversité et les écosystèmes, y compris la mesure dans laquelle elle contribue aux facteurs de perte et de dégradation de la biodiversité et des écosystèmes
  • les actions menées pour prévenir ou atténuer les impacts positifs et négatifs, réels ou potentiels, pour protéger et restaurer la biodiversité et les écosystèmes et pour traiter les risques et opportunités, ainsi que le résultat de ces actions
  • les plans et la capacité de l’entreprise pour adapter sa stratégie et son modèle économique, en conformité avec :
  • i. le respect des limites de la planète en ce qui concerne l’intégrité de la biosphère et le changement de système terrestre
  • ii. la vision du cadre mondial de Kunming-Montréal en matière de biodiversité ainsi que ses objectifs et cibles
  • pertinents
  • iii. les aspects pertinents de la stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030
  • iv. la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 92/43/CEE du Conseil (directives «Oiseaux» et «Habitats» de l’UE) ; et
  • v. la directive 2008/56/CE du Parlement européen et du Conseil (directive-cadre «stratégie pour le milieu marin»)
  • la nature, le type et l’ampleur des risques, dépendances et opportunités (sous-entendu financier) importants de l’entreprise liés à la biodiversité et aux écosystèmes, et la manière dont l’entreprise les gère; ainsi que
  • les impacts financiers sur l’entreprise, à court, moyen et long terme, des risques et opportunités importants résultant des incidences et dépendances de l’entreprise vis-à-vis de la biodiversité et des écosystèmes.


Les orientations et politiques présentées ci-dessus (Cadre Kunmings-Montréal, Stratégie de l'UE 2030, Stratégie de la France 2030) sont donc précieuses pour l'entreprise pour comprendre les exigences de la CSRD et pour orienter les Politiques et Actions de l'entreprise et par de là construire sa résilience (Exigence SBM3 de l'ESRS E2).

à suivre ...

En guise de conclusion, j'ose reprendre l'intégralité de la conclusion du rapport de la Banque Centrale Européenne : "Les risques liés à la dégradation de la nature et à la perte de biodiversité constituent des défis potentiellement importants pour l’objectif du SEBC (Système européen de banques centrales), fixé par le traité, qui est de maintenir la stabilité financière et des prix.

Pour relever ces défis, il faut adopter une approche systématique, proactive et globale afin de quantifier et d’évaluer l’augmentation des risques économiques et financiers liés à la nature.

L’accélération du rythme de la dégradation de la nature souligne l’urgence de ces considérations, et les négliger pourrait compromettre une stabilité écologique critique et la résilience économique.

Pour éviter les effets d’entraînement imprévisibles de la perte de biodiversité, les décideurs et les institutions financières devraient intégrer pleinement les coûts de la dégradation de la nature dans leurs processus décisionnels."


La CSRD trouve pleinement sa place et son utilité dans ce contexte, n'est-ce-pas ?


à bientôt dans un prochain post : pour en savoir plus, continuer à se former, échanger les bonnes pratiques et changer nos habitudes.


Transition écologique signifie avant tout Transformation des modes de vie.


Bonne semaine !


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