Je pratique le télétravail depuis 2010, cela fait donc 12 ans.

A l’époque, je travaillais déjà avec des logiciels uniquement en mode SAAS et la dématérialisation était entamée depuis 1 an.

L’occasion m’a été donné de recruter une collaboratrice dans le courant de l’année 2010 qui s’est révélée rapidement de grande compétence (hard skills et soft skills (quels mots affreux !)).

Julie venait travailler chaque jour depuis son village sis à quelques kilomètres de Meaux (environ 45 km à l’est de Paris).

Temps total consacré au déplacement durant cette journée : entre 3,5 heures et 4 heures, soit sur une semaine de 4 jours : entre 14h et 16h (soit l’équivalent de 2 journées de travail !)

Comme vous le constatez, nous avons tout de suite optimisé ces horaires par des semaines de 4 jours : 32 heures en saisons plus creuses et des semaines de 5 jours aux périodes plus chargées ; (soit sur une année, 20 semaines de 5 jours et 25 semaines de 4 jours)

Tout de même que d’énergie et de temps perdus, de compétence gaspillée, de capital santé gâché !

Un jour, nos emplois du temps se sont mal combinés et Julie ne pouvait pas accéder au bureau.

Comme nos outils étaient accessibles en mode SAAS, donc de partout, nous avons préparé toutes les informations dont elle pouvait avoir besoin, nous les avons stockés dans « le cloud ».

Julie a pu travailler « normalement » de chez elle.

L’incompatibilité d’emploi du temps s’est produite à nouveau 3 ou 4 fois avec toujours le même résultat d’efficacité : il était évident que ces lourds déplacements n’avaient pas de justification.

Nous avons donc décidé d’un commun accord que son travail se ferait à la maison avec tout de même une visite au bureau 1 fois tous les 15 jours, vite espacés à une fois par mois.

Julie a récupéré ainsi plus de 700 heures par an qui lui appartiennent.

Si ses temps de déplacement avait été limités à 1h par jour, soit ½ heure le matin et ½ heure le soir, elle aurait récupéré environ 200 heures sur une année.

A titre indicatif, voici le temps moyen consacré au temps de trajet domicile-travail en France (les données sont un peu anciennes mais cela reste très parlant.

Lecture du tableau : en 2010, 16 % des actifs en emploi, dont le lieu de travail principal n’est pas le domicile, mettent en moyenne plus d’1h30 pour faire un aller-retour (détour éventuel compris) entre leur domicile et leur lieu principal de travail ; en 1998, c’était le cas de 12 % des actifs en emploi.

Champ d’études : on parle ici des actifs occupés ayant renseigné une semaine normale dans le semainier et qui n’exercent pas principalement leur activité professionnelle à domicile, en France métropolitaine.

Voyons quelles sont les clés ou conditions de la réussite d'une organisation avec le télétravail.

Le métier

Tous les métiers ne peuvent pas se pratiquer en télétravail : le plombier peut difficilement installer votre nouvelle chaudière à distance, évidemment.

Poser un diagnostic médical à distance est désormais possible mais l’humain ayant une très grande part dans l’affaire, cela a ses limites.

Par contre traiter de l’information, comme dans le cas de la majorité des prestations intellectuelles ou administratives, est tout à fait adapté.

Il reste juste à faire circuler les informations traitées de façon fluide et sécurisée.

L'encadrement

Travailler dans un même lieu entraine un nombre important d’échanges d’informations de façon informelle.

Quelqu’un qui n’a jamais pratiqué le télétravail peut se sentir frustré car cette information informelle n’existe plus.

On passera alors par les canaux techniques modernes, téléphone (oral ou sms/texto), emails et autres messageries internes, visio par zoom, teams ou autre outil du même genre.

Mais on peut se joindre en réalité si facilement … et sans surcoût.

Cette mini barrière technologique a son avantage : mieux gérer le temps et éviter ces temps perdus même si quelque fois nécessaire autour de la machine à café.

La distance n’empêche pas l’encadrement : elle exige des demandes précises en face d’attentes clairement formulées : « ce qui se conçoit bien, s’énonce clairement » nous dit Boileau.

Mais il convient aussi de ne pas dénaturer le lien humain : se contenter d’un semblant de « dialogue» par email peut aller jusqu’à être cruel et insupportable.

Messages écrits ET téléphone (ne serait-ce que pour prendre des nouvelles) sont indispensables.

Et des journées de travail en présentiel, régulièrement, sont nécessaires peut entretenir la fluidité de la relation.

Un accord clair et écrit entre les 2 parties : le manager et le collaborateur

Pour que tout se passe bien, les modalités de travail seront décrites dans un document détaillé et signé par l’employeur et l’employé.

La période d'essai effectuée en interne

Le télétravail sera évité pour les nouveaux embauchés durant les premières semaines. Une immersion dans la culture de l’entreprise est très importante.

Le livret d’accueil sera particulièrement enrichi et soigné.

Idéalement la période d’essai, au minimum, et un peu plus sera effectuée en immersion dans l’entreprise. Evidemment cela dépendra aussi de l’expérience du candidat et de sa capacité d’adaptation.

Et me direz-vous, qu’en est-il pour les freelances ? Je mets dans cette catégorie les prestations de services très spécifiques achetées à des experts pointus : ils n’ont pas vraiment pour vocation de s’intégrer à l’équipe mais tout est relatif bien sûr.

Les outils mis à la disposition du collaborateur

Un certain degré de dématérialisation est nécessaire.

L’organisation de l’entreprise peut s’en trouver améliorée.

De nombreuses plates-formes collaboratives se sont développées aujourd’hui qui font le lien entre de nombreux outils (notes de frais, documentation, signature électronique, GED, outils métier, etc …)

Quel professionnel ne travaille pas en mode SAAS.

Attention : La sécurité de l’information est prioritaire dans la démarche, évidence dans une plus grande entreprise, quelque fois négligée dans une petite structure.

Il reste juste à faire circuler les informations traitées de façon fluide et sécurisée.

Le respect des horaires

J’ai glissé un mot au sujet du respect des horaires en parlant de la nécessité d’un accord écrit. Mais j’insiste là dessus, un collaborateur, un collègue n’est pas corvéable à merci et une information manquante pour terminer un dossier ne justifie pas d’empiéter sur le temps de la personne, qui ne vous a pas été vendu, et que vous n’avez pas acheté.

A vous de vous organiser en fonction des accords décidés. Réactivité ne signifie pas « corvéable à merci »

«ha ! moi, mon prestataire est génial, je peux l’appeler jour et nuit et il me rappelle dans l’heure » n’est pas un critère de qualité ! mais plutôt un signe de désorganisation et de discourtoisie pour l’un et un signe aussi de désorganisation pour l’autre.

Et l’urgence me direz vous : l’urgence est un leurre, elle n’existe pas. Anticipez ! et out ira bien.

L’urgence n’existe que dans les cas de danger de mort et peu de métier travaillent dans ce cadre.

Le toujours plus vite et cette course en avant de notre monde, cette culture de l’immédiateté le fait courir à sa perte.

Ce n’est ni Responsable, ni bon pour l’Environnement, ni socialement acceptable car cela nuit à la santé des humains et de la Planète.

Les qualités (soft skills) du télétravailleur

Télétravailler demande un certain nombre de qualité da la part du télétravailleur :

Un certain degré d’autonomie à commencer par le respect des horaires : travailler chez soi sans le "sas de décompression" que constitue le trajet «domicile-lieu de travail» est difficile pour certains.

Le télétravail n’est pas fait pour les débutants. Former demande un accompagnement lourd et de la présence, être formé demande de l‘attention, de l’écoute et de la concentration. Quand le candidat connait un peu son métier et respecte les horaires imposés par un travail en équipe, on peut commencer à envisager la réalisation de certaines tâches à distance.

S'organiser pour télétravailler

Travailler à la maison demande un peu d’organisation.

N’espérer pas garder les enfants : les modalités de garde qui avaient été organisées jusqu’à présent doivent être conservés.

Les tâches domestiques s’organisent aussi de la même façon, si le début de journée est fixé à 8h30, alors vous êtes à votre bureau à 8h30, sous peine de dérapages cumulés qui deviendront vite ingérables.

Idéalement une pièce de la maison sera aménagée à cet effet ou au minimum un coin bureau réservé, auquel aucun des autres membres de la famille n’aura accès, confidentialité oblige. Travailler sur la table de la salle à manger ou de la cuisine est à éviter. Une grande armoire ou placard dont l’intérieur est transformé en bureau et dont les portes peuvent être fermées, une fois le temps de travail effectué, est idéal.

Aimez travailler seul-e est un plus mais comme nous l’avons vu plus haut télétravailler ne signifie pas travailler en ermite : message ET téléphone au moins une fois par jour avec l’équipe sont essentiels.

Bouger : marcher 30 minutes par jour est une nécessité de santé corps et esprit.

Vous prenez goût à ce temps gagné en déplacement : tout de même rejoindre l’équipe une fois par mois ou tous les quinze jours est bien pour la cohésion des projets : l’être humain est un animal social !

L'emploi de Free Lance

Un freelance n’est pas généralement une personne intégrée à l’entreprise mais un prestataire qui vous a vendu une expertise précise : il s’organise seul et n’a de compte à rendre que sur ce qui est prévu au contrat.

Se voir "en vrai" régulièrement

J’insiste encore : évitez les réunions de calage mensuelles en format visio : c’est l’occasion de réunir l’équipe !

La confiance

La confiance est un élément essentiel du télétravail, ce qui n’empêche pas le contrôle. Vérifier les temps de connexion n’est pas la panacée mais les outils à distance nous y aident bien.

Bien mené et géré, le télétravail rend plus efficace.

Et la posture "Numérique Responsable" dans tout cela

Les métiers « intellectuels » en dehors des déplacements génèrent peu de GES (gaz à effet de serre). Un point doit toutefois avoir toute notre attention : Le Numérique.

Ordinateur fixe, ordinateur portable, écran, scanner, imprimante (de moins en moins utile), téléphone, box wifi, archivage dans le cloud, vidéos, réunions zoom : rien n’est neutre.

Former ou informer les équipes pour acquérir les bons réflexes est indispensable.