Newsletter n° 2025 - semaine 49 du samedi 13 Décembre

Le coût de l'inaction :

Une Dette Croissante face aux Enjeux Environnementaux et Sociaux

Face au changement climatique, à la perte de biodiversité, à la raréfaction des ressources naturelles et aux violations des droits humains, l'inaction représente aujourd'hui un risque économique, financier et réputationnel majeur pour les entreprises, les États et la société dans son ensemble. Contrairement à une perception encore répandue, ne pas agir coûte bien plus cher que d'investir dans la transition écologique et sociale. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : le coût de l'inaction se mesure en milliers de milliards de dollars, en pertes de croissance, en catastrophes évitables et en opportunités manquées.

NB : vous l’aurez compris, si vous êtes déjà un spécialiste de la RSE ou une grande entreprise, cet article n’est pas pour vous. Cet article est destiné aux ME (microentrepreneur effectif de moins de 10 personnes) et aux TPE/PME (effectif de moins de 250 personnes), concernées par la VSME (Norme Volontaire de rapport durable pour les TPE et PME).

Mais, cela peut servir de source d’inspiration, je l'espère ! Je vous laisse juge.

Voyons :

  • L'ampleur macroéconomique du coût de l'inaction climatique

  • Le coût de l'Inaction en France : des centaines de milliards en Jeu

  • La perte de biodiversité : un effondrement économique silencieux

  • Le coût humain et économique des violations des Droits Humains

  • L'Inaction ESG : risques financiers et réputationnels pour les entreprises

  • Les risques réglementaires et de marché

  • Le coût de la raréfaction des ressources naturelles

  • L'exposition des chaînes de valeur mondiales

  • Les coûts d'opportunité : Investissements nécessaires vs inaction

  • La dimension sociale et d'équité

  • Une nécessité stratégique et financière

L'ampleur macroéconomique du Coût de l'Inaction Climatique

Les estimations convergent : l'inaction climatique représente un fardeau économique considérable, bien supérieur au coût de la transition. Une étude récente menée par le réseau des banques centrales et superviseurs pour le verdissement du système financier (NGFS) évalue le coût de l'inaction climatique à 15 points de PIB à l'échelle mondiale d'ici 2050. Ce chiffre illustre l'ampleur des pertes économiques si les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas réduites rapidement. 

Une autre recherche majeure du Cambridge climaTRACES Lab ( https://climatraces.org/) et du Boston Consulting Group révèle qu'un scénario de réchauffement de +3°C d'ici 2100 pourrait réduire la production économique mondiale cumulée de 15% à 34%.

Dans un tel scénario, le coût de l'inaction pourrait atteindre 11% à 27% du PIB cumulé, soit l'équivalent de trois fois les dépenses mondiales de santé ou huit fois le montant nécessaire pour sortir l'humanité de la pauvreté d'ici 2100.   

Plus précis encore, l'Institut de recherche sur l'impact climatique de Potsdam (PIK) estime que les émissions passées ont déjà engagé l'économie mondiale à subir des dommages annuels de 38 000 milliards de dollars d'ici 2050, soit environ 19% des revenus par habitant (17% du PIB mondial). Cette estimation ne prend en compte que les conséquences des émissions déjà produites. Si l'humanité poursuit sur la trajectoire actuelle sans réduction drastique des émissions, les pertes économiques pourraient atteindre 60% des revenus mondiaux d'ici 2100 dans un scénario de réchauffement de +4°C.  

L'atténuation, par contraste, apparaît comme une solution économiquement rationnelle : investir entre 1% et 2% du PIB dans l'atténuation et l'adaptation permettrait de limiter le réchauffement à 2°C, réduisant les dommages économiques à seulement 2% à 4% du PIB.

L'action précoce est d'autant plus cruciale qu'une action immédiate pourrait réduire de moitié le coût de la transition d'ici 2030, le ramenant à 0,5% du PIB mondial contre 1,3% en cas de report de trois ans. 

Le Coût de l'Inaction en France : Des Centaines de Milliards en Jeu

Pour la France, les estimations sont également alarmantes. L'Agence de la Transition Écologique (ADEME) évalue qu'un réchauffement climatique de +3,5°C en 2100 réduirait le PIB français de 10 points de pourcentage, soit un minimum de 264 milliards d'euros rapporté au PIB de 2022. Les principales sources de dommages seraient :

  • Les catastrophes naturelles à l'étranger affectant les échanges extérieurs et le tourisme (6 points de PIB)

  • la baisse des rendements agricoles

  • la montée du niveau de la mer et

  • les catastrophes naturelles sur le territoire français. 

La Cour des comptes française a confirmé en septembre 2025 que le coût de la transition écologique reste bien inférieur à celui de l'inaction. Un scénario de statu quo entraînerait une perte de 11,4 points de PIB d'ici 2050, tandis que la transition nécessiterait des investissements de l'ordre de 2 à 3 points de PIB par an.

Les revenus français seraient réduits d'environ 13% d'ici 2050 selon les projections du PIK, en tenant compte des impacts de la hausse des températures, des variations de précipitations et des événements extrêmes. Ces pertes toucheront directement la productivité du travail, les rendements agricoles et les infrastructures.  

La Perte de Biodiversité : Un Effondrement Économique Silencieux

L'érosion de la biodiversité représente un coût économique tout aussi considérable, bien qu'encore moins visible dans les débats publics. L'Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services (IPBES) estime que l'inaction face à la perte de biodiversité pourrait coûter à l'économie mondiale entre 10 000 et 25 000 milliards de dollars annuellement, soit près d'un quart du PIB mondial.  

Cette destruction de la nature coûte actuellement plus de 5 000 milliards de dollars par an à l'économie mondiale, un montant équivalent au budget nécessaire pour permettre à l'Europe de transitionner vers les énergies renouvelables d'ici 2050. Les économies de la Chine, de l'Union européenne et des États-Unis présentent la plus forte exposition au risque de perte de biodiversité, avec 7 200 milliards de dollars de PIB combiné menacé.  

Des estimations conservatrices indiquent que l'effondrement des services écosystémiques essentiels — pollinisation, pêcheries marines et forêts natives — pourrait entraîner des pertes annuelles de 2 700 milliards de dollars d'ici 2030 au niveau mondial. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) évalue l'impact économique global de la perte de biodiversité à 10 000 milliards de dollars annuellement, incluant les coûts de santé liés à l'augmentation des maladies transmises et les pertes agricoles dues au déclin des pollinisateurs. Le déclin des populations d'abeilles, responsables de la pollinisation de cultures représentant plus de 235 milliards de dollars annuellement, menace directement la sécurité alimentaire mondiale.  

Retarder l'action sur la biodiversité ajouterait 500 milliards de dollars annuellement aux coûts futurs, et négliger cette crise doublerait les coûts actuels en seulement dix ans. Le rapport de l'IPBES souligne que la biodiversité décline à un rythme de 2% à 6% par décennie, détériorant les écosystèmes qui sous-tendent la sécurité alimentaire et la résilience climatique.  

En Europe, entre 34 et 48 milliards d'euros de subventions annuelles fragiliseraient l'équilibre des écosystèmes, selon le WWF, notamment via la Politique agricole commune encourageant l'élevage industriel et les pratiques agricoles non durables. Pour la France, le coût de la pollution agricole est estimé entre 15 et 64 milliards d'euros par an, incluant les impacts sur la biodiversité et les paysages. 

Le Coût Humain et Économique des Violations des Droits Humains

L'inaction face aux violations des droits humains dans les chaînes de valeur mondiales engendre également des coûts considérables, tant pour les victimes que pour les entreprises.

Le travail forcé génère des profits illégaux de 236 milliards de dollars annuellement au niveau mondial, une hausse spectaculaire de 37% (64 milliards de dollars) entre 2014 et 2024. Ces profits représentent des salaires volés à 27,6 millions de personnes piégées dans le travail forcé chaque jour en 2021.  

L'exploitation sexuelle commerciale forcée, touche 6,3 millions de personnes dont 27% d'enfants et génère à elle seule 99 milliards de dollars de profits illégaux par an, soit les deux tiers du total.

Le reste provient de l'exploitation économique dans la construction, l'industrie, les mines, l'agriculture et le travail domestique. 

Pour les entreprises, les violations des droits humains peuvent être extrêmement coûteuses. Une recherche du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) identifie cinq types de coûts liés aux litiges sur les violations des droits humains :

  • coûts financiers directs,

  • règlements à l'amiable,

  • coûts de divulgation d'informations,

  • dommages réputationnels

  • et baisse potentielle du cours de l'action. L'analyse de 151 cas de litiges montre une augmentation rapide et coûteuse de ces contentieux.  

L'analyse de 151 cas de litiges montre une augmentation rapide et coûteuse de ces contentieux.  

L'Inaction ESG : Risques Financiers et Réputationnels pour les Entreprises

Pour les entreprises, l'inaction face aux enjeux ESG se traduit par des risques financiers, réputationnels et opérationnels croissants. Selon une étude du Capgemini Research Institute menée auprès de 1 001 dirigeants, 44% des entreprises ont déjà subi un préjudice d'image lié à leur absence d'engagement durable, tandis que 27% ont fait face à des sanctions réglementaires (amendes, restrictions d'accès au marché, retraits d'autorisations).    

L'inaction climatique pourrait coûter plus de 500 milliards de dollars par an aux entreprises d'ici 2030 au niveau mondial, selon le rapport EcoVadis–BCG 2025. Ignorer les émissions liées à la chaîne d'approvisionnement (Scope 3) représente un risque majeur, alors que les entreprises qui gèrent activement leurs émissions de chaîne d'approvisionnement ont déjà économisé 13,6 milliards de dollars. Le potentiel d'opportunités financières liées à la réduction des émissions Scope 3 atteint 165 milliards de dollars, presque le double des 94 milliards de dollars d'investissements nécessaires pour les réaliser.  

Les risques physiques du changement climatique représentent une menace croissante. Les événements climatiques extrêmes ont causé plus de 560 milliards d'euros de pertes économiques entre 1980 et 2021 dans l'Union européenne. En Europe, les événements météorologiques extrêmes ont entraîné plus de 145 milliards d'euros de pertes économiques entre 2012 et 2022. Depuis 2000, les coûts liés aux catastrophes environnementales dépassent 3 600 milliards de dollars selon le Forum économique mondial. 

Au niveau microéconomique, une PME industrielle française peut subir des surcoûts énergétiques de 10% à 30% par an en raison de dérives non mesurées (fuites, mauvais réglages, surdimensionnements). Sur cinq ans, ces surcoûts peuvent atteindre 25 000 à 70 000 euros pour l'air comprimé, 30 000 à 90 000 euros pour le froid industriel, ou 40 000 à 120 000 euros pour le chauffage de process. 

Les Risques Réglementaires et de Marché

La non-conformité à la directive CSRD expose les entreprises françaises à des sanctions variées : exclusion des marchés publics à partir du 1er janvier 2026, amendes de 30 000 euros pour le dirigeant (plus 2 ans de prison et 150 000 euros pour l'entreprise) en cas de non-désignation d'un commissaire aux comptes, ou jusqu'à 75 000 euros d'amende pour le dirigeant (plus 5 ans de prison et 375 000 euros pour l'entreprise) en cas d'obstacle aux vérifications. 

Plus grave encore, 54% des entreprises ont déjà perdu des parts de marché en raison de leur inaction ESG. Les grilles d'évaluation ESG représentent désormais 10% à 30% du score final dans les appels d'offres, et il suffit d'un critère non rempli pour qu'une PME bascule dans la catégorie "à risque". Un exemple concret : une entreprise a perdu un appel d'offres de 650 000 euros pour un niveau de maturité ESG qu'elle aurait pu atteindre en trois mois.

Les entreprises ayant un score ESG élevé dans le S&P 500 affichent une meilleure productivité, un engagement accru du personnel et un accès à des taux de financement 50 à 100 points de base inférieurs à leurs concurrentes. À l'inverse, les entreprises négligeant l'ESG peuvent subir des pertes financières de 6% à 20% de leur chiffre d'affaires, principalement en raison des perturbations de la chaîne d'approvisionnement.  

Le Coût de la Raréfaction des Ressources Naturelles

La raréfaction des ressources naturelles constitue un risque de plus en plus tangible pour les entreprises et les économies. Le stress hydrique affecte particulièrement l'agriculture, qui représente 58% de la consommation totale d'eau en France métropolitaine. En période estivale, l'agriculture représente plus de 50% de la consommation totale d'eau sur les trois-quarts du territoire français. 

Les conséquences économiques sont déjà mesurables : une réduction de 40% des volumes prélevables en eau dans certains territoires français entraînerait des pertes de production équivalant à 6 millions d'euros par an, atteignant 10 millions d'euros en année sèche. Dans les Hauts-de-France, le scénario hydrique prévoit une perte de chiffre d'affaires de 14 millions d'euros par an pour l'agriculture et de 75 millions d'euros par an pour l'industrie agro-alimentaire, soit 5% de perte annuelle pour la filière. 

En Languedoc, le chiffre d'affaires de la filière viti-vinicole pourrait être réduit de moitié à terme en raison du stress hydrique. L'exposition des entreprises au stress hydrique menace la pérennité de leurs modèles d'affaires, car une entreprise confrontée à des pénuries d'eau voit ses coûts opérationnels augmenter, sa production diminuer et sa compétitivité s'éroder. 

L'Exposition des Chaînes de Valeur Mondiales

L'inaction au niveau de la chaîne d'approvisionnement représente un risque systémique majeur. Les entreprises rapportant au CDP identifient 162 milliards de dollars de coûts potentiels liés aux émissions Scope 3. En moyenne, les émissions de la chaîne d'approvisionnement des entreprises sont 26 fois supérieures à leurs émissions opérationnelles directes. 

L'engagement entre acheteurs et fournisseurs a déjà permis de réduire 43 millions de tonnes d'émissions en 2023, équivalant aux émissions annuelles de la Suède. Plus de 5 500 fournisseurs collaborent avec des acheteurs via le CDP Supply Chain, avec un potentiel de réduction de 193 millions de tonnes supplémentaires

Les Coûts d'Opportunité : Investissements Nécessaires vs Inaction

Contrairement aux idées reçues, les investissements nécessaires à la transition restent largement inférieurs au coût de l'inaction. Pour l'Union européenne, atteindre les objectifs climatiques et industriels à horizon 2030 nécessitera en moyenne 842 milliards d'euros d'investissements par an entre 2025 et 2030, soit 4,9% du PIB de l'UE. Avec un volume d'investissements climat estimé à 498 milliards d'euros en 2023, le déficit d'investissements s'élève à 344 milliards d'euros, soit 2% du PIB de l'UE.

En France, les investissements bas-carbone ont dépassé 113 milliards d'euros en 2024 (99 milliards dans les actifs privés et 13 milliards dans les actifs publics). La Stratégie pluriannuelle des financements de la transition écologique (SPAFTE) souligne la nécessité de doubler ces investissements d'ici 2030, tout en réduisant de 50% les investissements carbonés qui s'élevaient à 96 milliards d'euros en 2024. 

Pourtant, l'atténuation représente le moyen le plus rentable de réduire les dommages économiques du changement climatique, avec un retour sur investissement de 5 à 14 fois l'investissement initial. L'investissement combiné dans la mitigation et l'adaptation pourrait générer un retour d'environ 10 fois d'ici 2100

La Dimension Sociale et d'Équité

Les impacts de l'inaction ne sont pas équitablement répartis. Les régions les plus vulnérables subissent les conséquences les plus sévères. L'Afrique subsaharienne et l'Asie du Sud subiraient les contractions les plus importantes du PIB réel en cas d'effondrement des services écosystémiques d'ici 2030 : 9,7% annuellement et 6,5% respectivement.  

Les pays les moins responsables du changement climatique subiront des pertes de revenus 60% supérieures à celles des pays à revenu élevé et 40% supérieures à celles des pays à fortes émissions. Les catastrophes liées au changement climatique ont causé 12 000 désastres au cours des 50 dernières années, représentant 4 300 milliards de dollars de dommages, dont 90% des effets sont retombés sur les pays à faible revenu. 

Une Nécessité Stratégique et Financière

Face à ces constats, l'inaction n'est plus une option viable. Elle représente une décision économique à haut risque qui expose les entreprises et les États à des coûts exponentiels, à des pertes d'opportunités massives et à une dégradation irréversible des conditions de vie et de production. Les chiffres convergent tous vers la même conclusion : investir dans la transition écologique et sociale coûte une fraction du prix de l'inaction.

Le défi n'est plus de savoir si l'action est nécessaire, mais comment mobiliser rapidement les investissements requis et répartir équitablement l'effort entre acteurs publics et privés. Les entreprises qui anticipent ces transformations bénéficieront d'avantages compétitifs considérables : réduction des coûts opérationnels, accès privilégié aux financements, résilience accrue face aux crises, attractivité renforcée auprès des talents et des clients. Celles qui temporisent accumulent silencieusement des passifs financiers, réputationnels et opérationnels qui menaceront à terme leur viabilité.


à suivre ...

L'inaction a un prix bien supérieur à celui de l'action. C'est la leçon économique majeure que nous enseignent les données scientifiques, financières et opérationnelles disponibles. Face aux enjeux RSE, climatiques, de biodiversité, d'accès aux ressources et de droits humains, l'urgence n'est plus à démontrer : elle est à financer, à organiser et à déployer, avant que le coût de l'inaction ne devienne insurmontable.

La semaine prochaine, nous verrons 10 leçons à appliquer pour enrayer ce coût de l'inaction si on est une TPE ou une PME


à bientôt dans un prochain post : pour en savoir plus, continuer à se former, échanger les bonnes pratiques et changer nos habitudes.

Transition écologique signifie avant tout Transformation des modes de vie.

Bonne semaine !

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